Question d’une habitante

Question déposée sur le site internet du Syctom

 

Date : 28 novembre 2017

 

Soyez conscients de votre proposition de projet à Romainville : 


 

« Un incinérateur de Seine-et-Marne et sa dioxine devant la justice



LE MONDE | 27.11.2017 à 11h31 | Par Patricia Jolly

 

L’agglomération de Melun est poursuivie pour avoir maintenu le site en fonctionnement malgré des mises en demeure.

 

Lorsqu’elle s’est installée à Maincy il y a quarante ans, à la naissance de son premier enfant, Pascale Coffinet, était convaincue d’avoir fait le meilleur des choix. Fini la pollution parisienne, vive le bon air de la campagne, le poulailler et le potager « bio » qu’elle se réjouissait d’entretenir dans cette commune rurale de Seine-et-Marne de 1 800 âmes dépourvue d’industries.

 

Un détail chiffonnait tout de même cette artiste-peintre aujourd’hui âgée de 67 ans : la pellicule de poussière omniprésente sur son mobilier de jardin. Mais la mairie de Maincy lui livrait invariablement une histoire rassurante de « vent du Sahara » pourvoyeur de « sable », et lui assurait que les rejets de l’incinérateur de déchets ménagers tout proche de Vaux-le-Pénil – en activité depuis 1965 – étaient scrupuleusement passés au crible.

Du 27 novembre au 9 décembre, la communauté d’agglomération de Melun Val de Seine – propriétaire-exploitant de l’incinérateur durant quelques mois, après une fusion avec le syndicat intercommunal qui l’opérait à l’origine – répondra pourtant devant le tribunal correctionnel de Paris des délits de « mise en danger de la personne » entre 1999 et 2002, et de « poursuite d’une installation classée non conforme » entre mars et juin 2002.
« Des rejets 2000 fois supérieurs à la norme »

 

Devenue première magistrate de Maincy en 2001, Pascale Coffinet n’a pas tardé à découvrir le pot aux roses. Nichée dans une cuvette géographique située sous les vents dominants de l’incinérateur, Maincy a longtemps subi ses rejets de dioxine dévastateurs.

« L’incinérateur, qui n’était plus aux normes, avait continué de fonctionner malgré des arrêtés préfectoraux de mise en demeure de 1999 et 2001, et des résultats d’analyses de 2002 ont fait état de rejets de dioxine plus de 2 000 fois supérieurs à la norme, a-t-elle expliqué au Monde. Or, en tant que maire, j’étais personnellement responsable de la santé de mes administrés. »

 

Pour pouvoir leur garantir un air de qualité, elle fait alors analyser son propre sang et les œufs de ses poules par un laboratoire spécialisé en matière de dioxine à Liège, en Belgique. Les taux relevés sont si alarmants que le biologiste lui téléphone immédiatement pour l’avertir. Saisi de ces résultats, le préfet ne réagit d’abord pas. Ce n’est qu’à la suite d’un arrêté municipal interdisant la consommation d’œufs produits à Maincy, pris par Pascale Coffinet, qu’il diligente une campagne de mesure puis recommande aux Maincéens de bannir les volailles, les œufs et les cucurbitacées locaux.

 

En 2003, Pascale Coffinet fonde l’Association des victimes de l’incinération de déchets et de leur environnement (AVIE) dont elle est toujours présidente, et saisit la justice. L’AVIE regroupe aujourd’hui 165 personnes physiques riveraines de l’incinérateur qui se sont constituées parties civiles dans le dossier, tout comme la commune de Maincy. L’instruction, d’abord menée par le tribunal de grande instance de Melun, puis transférée en 2005 au Pôle judiciaire de santé publique de Paris, a duré quatorze ans.
Des sarcomes et des lymphomes

Selon Pascale Coffinet, si le nouvel incinérateur créé sur l’ancien site est « conforme aux normes », Maincy n’est pas pour autant débarrassé des dioxines. « Les résidus se déposent durablement sur les toits et les sols », affirme l’ancienne maire, qui a achevé son mandat en 2008.

 

Considérées comme des perturbateurs endocriniens, les dioxines contaminent les êtres humains par le biais de l’alimentation, notamment le lait de vache, ou les œufs de poules élevées en plein air.

 

Dans ce dossier, les plaintes pour « mise en danger de la personne » sont essentiellement fondées sur un risque accru de sarcomes des tissus mous et de lymphomes malins non hodgkiniens (cancers rares de ganglions lymphatiques) auxquels une dizaine de riverains de l’incinérateur auraient succombé ces dernières années. Le lien de causalité entre les rejets de dioxines et ces pathologies n’étant pas formellement établi, l’agglomération melunaise n’est pas poursuivie pour « homicides et blessures involontaires ».

 

En 2012, la cour d’appel de Chambéry a relaxé une filiale de Suez-Environnement condamnée en première instance pour avoir exploité l’incinérateur de déchets de Gilly-sur-Isère (Savoie), à l’origine d’une grave pollution à la dioxine dans les années 2000. Son unique exploitant s’était dissous quelques mois avant de comparaître provoquant ainsi l’abandon des poursuites à son encontre. »

 

Réponse du Syctom : 

Bonjour,

 

Plusieurs études relatives aux effets sur la santé de l’incinération des ordures ménagères en France ont été réalisées. Les plus récentes, financées par le plan cancer à partir de 2004 porte sur des études épidémiologiques d’envergure nationale pour l’une sur l’imprégnation biologique de la population aux dioxines autour des usines d’incinération et pour l’autre sur l’impact de l’exposition des fumées d’incinération sur l’incidence des cancers.

 

L’objectif de l’étude relative à l’impact des usines d’incinération sur l’incidence des cancers était d’analyser la relation entre l’incidence des cancers chez l’adulte et l’exposition aux émissions atmosphériques des usines d’incinération d’ordures ménagères. Elle a porté sur l’analyse de près de 135 000 cas de cancer dans les départements du Haut-Rhin, du Bas Rhin, de l’Isère et du Tarn entre 1990 et 1999. Une relation statistique significative a été mise en évidence chez la femme entre l’exposition aux incinérateurs et l’incidence des cancers toutes localisations réunies, du cancer du sein et des lymphomes malins non hodgkiniens. Un lien significatif a été également retrouvé pour les lymphomes malins non hodgkiniens chez les deux sexes confondus et pour les myélomes multiples chez l’homme uniquement. Cette étude écologique géographique ne permet pas d’établir la causalité des relations observées, mais elle apporte des éléments convaincants au faisceau d’arguments épidémiologiques qui mettent en évidence un impact des expositions anciennes des incinérateurs sur la santé. Portant sur une situation passée, ses résultats ne peuvent pas être transposés à la période actuelle.

 

Quant à l’étude relative à l’imprégnation de la population par les dioxines autour des usines d’incinération, son objectif principal était de savoir si les populations résidant autour d’UIOM étaient plus imprégnées par les polluants émis par les incinérateurs que celles qui en étaient éloignées et de préciser les déterminants (alimentaires ou autres) de cette imprégnation. Cette étude apporte aussi les premières données françaises d’imprégnation sérique par les dioxines.

 

L’étude porte sur une exposition plus récente (années 1990-2005) que l’étude sur les cancers. Cette étude a évalué l’impact de la consommation de produits locaux sur l’imprégnation biologique par les dioxines – mesurée dans le sérum – et a fourni de précieuses informations sur l’exposition. Elle a montré que le fait de résider sous le panache d’un incinérateur d’ordures ménagères n’avait pas de répercussion sensible sur la concentration sérique de dioxines et qu’il n’y avait pas d’élément en faveur d’une exposition par inhalation. Seuls, les consommateurs de produits laitiers et d’œufs provenant d’animaux élevés dans l’aire de retombée au sol des émissions, les agriculteurs notamment, présentaient des concentrations sanguines de dioxines significativement plus élevées que les témoins non exposés à un incinérateur ; cette surexposition était observée principalement dans le cas d’installations anciennes et hors normes. Par ailleurs, l’étude a montré que l’imprégnation par les dioxines de la population française se situe dans la moyenne européenne et que les facteurs individuels – tels que l’âge, la corpulence – et la consommation alimentaire habituelle, en particulier celle des produits de la pêche, en sont les déterminants essentiels.

 

Ces deux études confirment l’utilité des limites d’émission de polluants qui sont appliquées depuis le début des années 2000 pour les incinérateurs « nouvelle génération ».

Les conclusions de ces études sont les suivantes : « Avec ces mesures, l’impact sanitaire des incinérateurs d’ordures ménagères pourrait être suffisamment contrôlé pour que se pose la question de faire désormais porter l’effort de recherche sur d’autres sources de pollution industrielles moins réglementées. »

 

Dans le cadre du projet de reconstruction du centre de Romainville/Bobigny, trois solutions techniques sont envisagées pour la gestion des ordures ménagères résiduelles dont la création d’une chaufferie CSR (combustible solide de récupération) qui respecterait les seuils très contraignants de rejets. Le Syctom veille à garantir la maitrise des impacts environnementaux et sur la santé, de l’ensemble de ses installations.

 

Par ailleurs, une chaufferie CSR se distingue d’un incinérateur classique pour les raisons suivantes :

 

  • Une chaufferie CSR a pour finalité la production d’énergie et les capacités sont dimensionnées au regard d’un besoin local de chaleur ; elles sont conçues de manière à être adaptables à un autre combustible pour ne pas être dépendantes d’un approvisionnement en déchets (remplacement du CSR par de la biomasse bois par exemple).

 

  • Les CSR bénéficient d’une définition règlementaire propre inscrite au Code de l’environnement (article R. 541-8-1) : « Un combustible solide de récupération est un déchet non dangereux solide, composé de déchets qui ont été triés de manière à en extraire la fraction valorisable sous forme de matière dans les conditions technico-économiques du moment, préparé pour être utilisé comme combustible dans une installation relevant de la rubrique 2971 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement. ». Les CSR constituent des substituts aux énergies fossiles : ils sont riches en énergie, stockables et transportables vers une installation de production d’énergie. La composition des CSR varie en fonction des lieux et des périodes de production : ils peuvent contenir du bois, des textiles, des plastiques variés, des mousses, des cartons, des papiers provenant des refus de tri des encombrants et des collectes sélectives.

 

  • Les chaufferies CSR présentent des performances énergétiques et environnementales optimisées. En effet, l’utilisation d’un combustible calibré et de qualité constante et connue permet un fonctionnement régulier de l’installation et un faible besoin en maintenance. Les rejets de l’installation peuvent être minimisés compte-tenu de la très faible teneur en polluants contenus dans les CSR, la réglementation encadrant non seulement le fonctionnement des chaufferies CSR mais également la qualité intrinsèque du combustible.

 

 

Publié dans Post-concertation

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*