Date : 22 décembre 2017
Question adressée par e-mail à Monsieur le garant, Jacques Roudier.
Monsieur le garant,
J’ai assisté jeudi 21 décembre à la séance du Syctom qui a approuvé la construction d’une installation de séchage dit « naturel », visant à préparer le combustible pour l’incinération à partir d’OMR, sur le site de l’actuel centre de transfert de Romainville.
L’unanimité étouffante qui a caractérisé cette séance n’aurait pas déplu au regretté Kim Il Sung. Seul le vote contre de M. Laurent Abrahams, élu de Montreuil, a sauvé l’honneur de cette institution préposée au traitement des déchets de la plus grande partie de la Région Parisienne.
L’adoption au conseil d’Est Ensemble d’une note de positionnement et d’une délibération allant dans le même sens que la décision du Syctom, le 19 décembre dernier, dans des conditions assez bizarres, où le quorum des présents ne semblait même pas atteint, laisse planer le doute quant à la régularité de cette décision.
Lors du comité syndical du Syctom, tous les intervenants n’en finissaient plus de s’auto-congratuler de l’exemplarité démocratique de cette décision, de la transparence de la concertation, de l’ampleur du débat.
Or vous savez parfaitement – comme cela a été mis en lumière lors de la séance de clôture de cette consultation à Bobigny le 7 novembre dernier – que la population locale n’est en rien satisfaite de l’information fournie, ni des procédures adoptées, ni des décisions qui allaient être prises.
Vous savez bien, et il faudra le rappeler à la présidence du Syctom quand les oppositions commenceront à se manifester véritablement, que :
- très peu de monde a été réellement informé et impliqué dans le processus de concertation ;
- la solution n° 2 qui a été approuvée par le Syctom n’a été portée à la connaissance du public qu’en cours de route et n’était pas initialement prévue, car seule une installation de préparation de combustibles CSR avait été envisagée ;
- sur cette technique dite de « séchage naturel » le Syctom n’a jamais fourni les renseignements techniques que tout le monde – y compris Est Ensemble – réclamait pour pouvoir se prononcer ;
- l’enchaînement des décisions entre le positionnement d’Est Ensemble et le vote du Syctom ressemble bien à un passage en force, dans des délais qui ne pouvaient pas permettre à qui que ce soit d’approfondir la connaissance du procédé choisi ;
- dans les jours et mois à venir, des informations sur le procédé choisi remonteront à la surface et ne manqueront pas de nourrir l’opposition face à l’absence de discussion sur la décision prise.
Ce qui est certain, c’est que la décision du Syctom montre bien quelle est la logique à l’œuvre dans cette institution, malgré ses tentatives de greenwashing.
- Le Syctom a déjà approuvé et financé à hauteur de deux milliards d’euros la reconstruction de l’incinérateur d’Ivry accompagné d’une installation de TMB, qui devra l’alimenter.
- En décidant de sécher les OMR sur le site de Romainville, il fait le choix de continuer à produire du combustible pour ses incinérateurs. Cette décision est le triomphe du statu quo.
- Le procédé choisi est certes moins nuisible et dangereux que celui de l’ancien projet délirant de TMB, mais va dans la même direction : surtout pas de collecte sélective généralisée des biodéchets en porte-à-porte – seule solution correcte pour parvenir à un résultat de tri de niveau européen – collecte qui continue d’être considérée comme une dépense inutile et onéreuse.
- La forte densité urbaine qui justifie dans le discours du Syctom son refus obstiné de travailler dans la perspective d’une mise en place de collecte sélective des biodéchets n’est curieusement jamais retenue comme argument pour refuser les nuisances qu’engendre sur l’agglomération parisienne l’incinération des OMR (qui se traduit aussi par l’enfouissement de 30% des résidus de combustion).
- La solution 1 – parmi les trois envisagées – aurait laissé la porte ouverte à la recherche d’une véritable réponse au problème de la réduction des déchets. La solution adoptée grave dans le marbre la politique du Syctom pour les 20 prochaines années : brûler, brûler, brûler.
Dans ces conditions, le Syctom ne devra pas s’étonner si la population trouve d’autres moyens pour exprimer son opposition à ces « solutions » d’un autre âge et à ses pratiques autoritaires.
Réponse de Monsieur le garant, Jacques Roudier (apportée le 24 décembre 2017)
Bonjour Monsieur,
J’ai bien reçu votre message du 22 décembre.
Il appelle de ma part deux observations :
- la solution dite 2 n’a pas été introduite en cours de route; elle figure dans le dossier que le maître d’ouvrage a produit avant le début de la concertation. Cette solution a fait l’objet d’un certain nombre de questions et d’informations complémentaires qui ont été fournies par le maître d’ouvrage et ses équipes et mises en ligne au fur et à mesure qu’elles étaient produites.
- le bilan que j’ai produit rapporte ce qui a été dit au cours de la concertation, qui est plus nuancé que vous le dites dans votre message.
Pour le reste, il ne m’appartient pas de commenter les décisions du Syctom.
Réponse apportée par le Syctom
Bonjour Monsieur,
Vous avez adressé des remarques à Monsieur le garant, Jacques Roudier au sujet du projet de reconstruction du centre à Romainville / Bobigny, de la concertation préalable et de son issue.
En complément, le Syctom souhaite apporter quelques précisions au sujet de sa décision, étant entendu qu’il ne revient pas au Syctom de commenter les décisions des élus de l’Etablissement Public Territorial Est Ensemble.
A l’occasion de la concertation préalable sur le projet, le Syctom a mis en œuvre un dispositif d’information et de participation du public complet, et qui dépassait les exigences de la réglementation en la matière.
Lors de la réunion publique de clôture du 7 novembre, le Syctom a présenté les différents temps de concertation qui ont été organisés (2 réunions publiques, 4 ateliers thématiques, une exposition itinérante de 12 étapes sur 5 villes), et la large palette d’outils d’information mis à la disposition du public (site internet, lettres d’information, flyers, publicité dans les journaux, articles dans les supports municipaux…). Le garant a répertorié ces différentes actions dans son bilan et a reconnu les efforts mis en œuvre par le Syctom pour aller à la rencontre du public et diversifier les canaux pour lui permettre de s’informer et l’inciter à participer à cette concertation et aux réflexions menées sur le projet. La CNDP, lors de sa séance plénière du 6 décembre 2017, a par ailleurs pris acte du bilan de Monsieur Roudier.
Concernant la solution n°2 dite d’optimisation de la logistique urbaine prévoyant un recours au séchage naturel des OMR, dès le mois d’octobre 2017, a été mis à la disposition du public une fiche technique présentant ce procédé (disponible ici). Une présentation plus détaillée de cette solution a également été réalisée lors de l’atelier n°3 dédié aux solutions de gestion des OMR. Enfin, le Syctom a répondu tout au long de la période, aux questions qui lui ont été posées par l’intermédiaire du site internet.
Les demandes d’information complémentaire formulées notamment par les élus locaux, pendant et après la concertation préalable (notamment par l’EPT Est Ensemble le 21 novembre), ont été entendues. Aussi, le Syctom a proposé aux membres du Comité de suivi du projet (élus et représentants des villes de Romainville et Bobigny et de l’EPT Est Ensemble, représentants associatifs – Arivem, Environnement 93 et FNE Ile-de-France – et représentants du personnel), de visiter une installation mettant en œuvre un procédé analogue. Cette visite a eu lieu à Londres (Frog Island) le 8 décembre 2017, soit en amont du Comité syndical du 21 décembre 2017.
Cette visite a permis de lever les interrogations restées en suspens à ce sujet, et a donc permis aux élus de prendre leur décision en regard de leur appréciation de cette visite. Les élus représentés au Comité syndical qui n’ont pas participé à la visite ont également été destinataire d’une note d’information complémentaire. Les équipes du Syctom se sont donc efforcées d’apporter toutes les précisions nécessaires aux élus pour leur permettre de prendre une décision en connaissance.
Ce document a été mis en ligne sur le site internet du projet, pour être accessible à tous. Vous pouvez en prendre connaissance en cliquant ici.
Par ailleurs, vous mentionnez les collectes de biodéchets et les efforts à faire pour mettre en œuvre une politique cohérente au niveau du territoire. La solution n°2 est une solution flexible qui reste pertinente dans le cadre d’une politique ambitieuse d’amélioration du geste de tri et en particulier, après la généralisation de la mise en œuvre de la collecte sélective des biodéchets, actuellement en phase d’expérimentation. En effet, en partenariat avec l’établissement Public Territorial Est-Ensemble, compétent en matière de collecte, le Syctom a engagé en octobre 2017 une expérimentation de collecte des déchets organiques dans le quartier du Bas-Pays à Romainville, à l’occasion de laquelle des animations de prévention et de sensibilisation sont organisées avec les services publics locaux sur le territoire (distribution des bio-seaux, porte-à-porte, animations en écoles…). A titre d’exemple, ces procédés de séchage existent depuis plusieurs années dans la région de Milan où les collectes sélectives de biodéchets sont performantes. Ces procédés restent efficaces même quand les déchets résiduels contiennent une très faible proportion de matière organique notamment car la collecte séparative des déchets alimentaires ne couvre pas tout le spectre de la matière organique contenue dans les OMr.
En outre, concernant le montant affecté au projet Ivry-Paris XIII, le coût affecté à la reconstruction du centre s’élève à 962 millions d’euros (dont 457 M€ pour l’UVE et 505 M€ pour l’UVO).
Enfin, fort des enseignements tirés de la concertation préalable sur le projet et conformément à la décision de la CNDP du 6 décembre 2017, le Syctom a décidé de poursuivre l’information et la participation du public sur le projet jusqu’à l’ouverture de l’enquête publique. Les modalités de mise en œuvre de ce dispositif seront précisées avec le garant ces prochaines semaines et tiendront compte de l’avancement du projet et des prochaines étapes : phase de consultation jusqu’au choix de l’opérateur pour la construction de l’installation puis phase de présentation du projet retenu jusqu’à l’ouverture de l’enquête publique.
Laisser un commentaire